L’Histoire de Tinariwen
Tinariwen est un groupe pionnier touareg qui a profondément influencé la perception mondiale de la musique saharienne. Le groupe a été fondé à la fin des années 1970 par Ibrahim Ag Alhabib, qui, enfant, a été témoin de l’exécution de son père lors des révoltes touarègues au Mali. Contraint à l’exil, il a passé ses années de formation dans des camps de réfugiés en Algérie, où il a fabriqué sa première guitare à partir d’une boîte de pétrole, de bois et de câbles de bicyclette. Inspiré par l’esprit révolutionnaire du peuple touareg et influencé par des artistes occidentaux tels que Jimi Hendrix et Bob Marley, Ibrahim a commencé à composer des chansons qui parlaient de l’exil, de la résistance et du désir d’une terre natale.
Dans les années 1980, alors que de nombreux jeunes touareg étaient déplacés en raison des conflits politiques au Mali et au Niger, ils trouvèrent refuge en Libye, où Mouammar Kadhafi encouragea les guerriers nomades à s’entraîner dans ses camps militaires. C’est durant cette période que Tinariwen se forma en tant que collectif de musiciens, utilisant leurs chansons comme forme d’expression sociale et politique. Contrairement à la musique touarègue traditionnelle qui reposait principalement sur des flûtes et des percussions, Tinariwen introduisit la guitare électrique, fusionnant les mélodies traditionnelles avec les rythmes hypnotiques du blues du désert. Leur musique devint la bande-son officieuse des mouvements de résistance touareg, se diffusant à travers le Sahara sur des cassettes bien avant qu’ils ne gagnent une reconnaissance internationale.
Avant d’adopter le nom de Tinariwen, le groupe était à l’origine connu sous le nom de « Sawt al-Hougar » (صوت الأهقار), signifiant La Voix du Hoggar en arabe. Leur premier concert eut lieu en 1981 à Alger, marquant le début de leur parcours en tant qu’ambassadeurs musicaux de la cause touareg.
Au début des années 2000, Tinariwen se produisit au Festival au Désert au Mali, où de nombreux journalistes occidentaux découvrirent leur musique. Leur premier album studio, The Radio Tisdas Sessions (2001), suivi de Amassakoul (2004), les établit comme une force mondiale dans la musique du monde. Au fil des ans, ils ont collaboré avec une grande variété d’artistes, de Robert Plant et Carlos Santana à des membres de TV on the Radio et Wilco. Leur album de 2011, Tassili, remporta le Grammy Award du Meilleur Album de Musique du Monde, consolidant leur statut d’ambassadeurs culturels du peuple touareg.
Malgré leur succès, Tinariwen est resté fidèle à ses racines. Leur musique continue de documenter les luttes des Touareg, abordant des thèmes de déplacement, d’identité et de résilience. Avec des paroles poétiques en tamasheq, leurs chansons évoquent l’immensité du désert et l’esprit d’un peuple qui a enduré des siècles de souffrance.
Aujourd’hui, la composition du groupe comprend :
• Ibrahim Ag Alhabib – Fondateur, guitariste, chanteur
• Alhassane Ag Touhami – Chanteur, guitariste
• Abdallah Ag Alhousseyni – Chanteur, guitariste
• Eyadou Ag Leche – Bassiste, chœurs
• Said Ag Ayad – Percussionniste, chœurs
• Elaga Ag Hamid – Guitariste
• Bachir Ag Ahmed – Guitariste
Les anciens membres incluent :
• Intayadene Ag Ablil – L’un des membres fondateurs (décédé)
• Intidao Ag Alhassane – Ancien guitariste et chanteur
• Keddou Ag Ossad – Ancien membre
• Mohamed Ag Itlale (Japonais) – Ancien membre (décédé)
La Maison de Tinariwen : Un Héritage pour l’Avenir
Dans le cadre de l’initiative l' »Atlas des Mondes qui Disparaissent, l’un des objectifs clés est de créer La Maison de Tinariwen — un espace dédié à la préservation, la célébration et la continuité de l’héritage musical du groupe. Le fondateur de Tinariwen, Ibrahim Ag Alhabib, a exprimé ses inquiétudes concernant la perte de nombreuses de ses premières compositions, car elles existent uniquement dans sa mémoire et n’ont jamais été correctement enregistrées ou archivées. Ce projet vise à créer une institution pérenne où l’histoire du groupe, ses enregistrements et son parcours créatif pourront être préservés pour les générations futures.
Jusqu’à ce que les conditions de sécurité permettent la création d’un lieu physique, La Maison de Tinariwen existera initialement comme une plateforme virtuelle, offrant une archive numérique et un espace interactif pour l’exploration musicale. Toutefois, ce projet est envisagé comme bien plus qu’un musée — il servira de centre créatif dynamique, offrant aux jeunes musiciens l’opportunité d’apprendre de l’héritage de Tinariwen tout en développant leur propre art. Le centre abritera des enregistrements rares, des paroles manuscrites, des instruments traditionnels et des expositions multimédia, plongeant les visiteurs dans le monde riche de la musique touareg.
De plus, La Maison de Tinariwen jouera un rôle crucial dans l’enseignement et le soutien des artistes émergents, en offrant un studio d’enregistrement à la pointe de la technologie et un espace collaboratif où les musiciens du Sahara — de Kidal à Tamanrasset — pourront se réunir pour échanger des idées, innover et créer de nouveaux sons.
En créant La Maison de Tinariwen, cette initiative ne cherche pas seulement à honorer et préserver le passé, mais aussi à inspirer et à inspirer les générations futures d’artistes touareg, en veillant à ce que leurs voix continuent de résonner à travers le monde.
Souleymane Ag Anara, Professor Maria Elena Avino, Iknane Ag Hamed Ahmed, Samana Mohamed Al-Mostapha, Dario Berardi
ainsi qu’à tous les artistes et figures emblématiques qui ont partagé leurs récits pour les générations futures.